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Shino – l’émail du feu et de la lenteur
Origine et histoire du Shino japonais
Le Shino est né au Japon, dans la région de Mino, vers la fin du XVIᵉ siècle. Il s’agit du premier émail blanc de la céramique japonaise, apparu à une époque où les cuissons au bois duraient plusieurs jours et révélaient des effets imprévisibles : bulles, fissures, zones d’orange vif, voiles laiteux…
Le Shino traditionnel était composé presque uniquement de feldspath broyé, parfois enrichi d’un peu de silice ou d’argile. En fusionnant lentement, il créait une texture épaisse, vivante, marquée par les cendres du four. Chaque pièce était unique, empreinte du passage du feu. C’est cette rencontre entre terre, flamme et patience qui a fait du Shino une légende de la céramique japonaise.
Caractéristiques et esthétique du Shino
L’émail Shino se reconnaît à ses surfaces épaisses et satinées, souvent blanches à rosées, parfois marbrées de zones orangées dues à la réduction. Il se fissure, se voile, se creuse légèrement. C’est un émail vivant — il bouge, respire, évolue avec la lumière et le feu.
Loin de la perfection lisse des glaçures modernes, le Shino valorise le hasard et l’imperfection. C’est une esthétique du wabi-sabi: la beauté du simple, du fragile, du vrai. Sur les bols à thé japonais, il incarne la lenteur, le geste, la présence.

Les Shino contemporains
Depuis les années 1960, le Shino a traversé les océans. Les potiers occidentaux — américains, coréens, européens — l’ont adapté à leurs fours à gaz ou électriques, en variant les compositions : Shino au soude, Shino au cuivre, Shino carbone… Chaque version explore une facette différente : du blanc neigeux au rose saumon, du mat au brillant, du calme au volcanique.
Le Shino à l’Atelier Terre et Bois
À Colmar, dans mon atelier niché entre verre et végétation, je poursuis cette recherche autour du Shino. Mon Shino maison est un mélange de feldspath clair, silice, kaolin et oxyde de fer, sans ajout d’étain. Il réagit fortement en cuisson au gaz en réduction, entre 1250 °C et 1280 °C. Selon le trajet de la flamme, il peut devenir blanc crémeux, rosé, parfois brun orangé. Certaines zones gardent des bulles fines, d’autres se matifient en surface — un paysage de feu, chaque fois différent.
J’aime l’utiliser sur mes grès crème et rouge, pour le contraste entre la terre et la lumière de cet émail japonais. C’est une façon d’unir deux cultures : l’Alsace et le Japon, entre le brut et le raffiné, le contrôle et le lâcher-prise.

Une matière qui échappe à la main
Travailler le Shino, c’est accepter de ne pas tout maîtriser. Même avec une base stable, chaque cuisson apporte sa surprise : une coulure nouvelle, une teinte inattendue, une bulle figée dans la lumière. L’émail vit sa propre vie. Le rôle du potier est d’écouter, d’observer, d’accompagner.
C’est cette part de hasard et de feu qui me fascine. Chaque ouverture de four devient un moment de vérité. Certaines pièces sont sobres, calmes. D’autres explosent de chaleur et de texture. Toutes portent la trace du feu — et c’est là, pour moi, que réside la beauté du Shino.

Conclusion : l’esprit du Shino
Le Shino n’est pas seulement une recette d’émail. C’est une philosophie du geste et du temps lent, une manière de laisser le feu peindre la matière. Il incarne le lien entre l’homme, la terre et la flamme — fragile, imprévisible, essentiel.
Dans chaque cuisson, je retrouve la même émotion : celle de voir la matière se transformer, de sentir que quelque chose m’échappe, et d’aimer ce qui reste.
Pour prolonger ce dialogue entre la terre et le feu, découvrez les pièces façonnées à la main et recouvertes de mon émail Shino dans la collection Esprit Mingei — des objets simples, silencieux, faits pour accompagner la vie quotidienne.
